Celui-ci est haut en couleurs comme le sont souvent les fêtes des marabouts, saints et santons en Tunisie. Le printemps est le moment où se tiennent ces rituels, comme pour accompagner la renaissance que symbolise cette saison.

Selon la croyance locale, la Mokhôla était une femme, très blanche de peau et à la chevelure d’ébène qui serait venue du Maroc, avec son frère et plusieurs compagnons. Cette jeune vierge, à l’imposante stature, était vêtue de vert et portait une coiffe rouge. Elle fit une halte près de Bab-er-Roumia (l’arc de Sévère Alexandre à la lisière ouest du village) et les Douiggis l’empêchèrent de poursuivre sa route. Après avoir consulté le Tout Puissant, elle s’installa à l’embouchure de l’acqueduc romain près des citernes de Aïn-El-Hammam.

La Mokhôla est toujours vénérée, même si les villageois ont quitté le site archéologique. Chaque année, la fête de la Mokhôla est un moment sacré. Il faut dire qu’on lui prête plus d’un miracle comme faire pleuvoir, guérir les malades, trouver un conjoint pour les célibataires, aider à la réussite des études, faire revenir le voyageur sain et sauf et surtout, elle rendrait la terre, les femmes et les animaux fertiles.

Au printemps, les citernes de Aïn-El-Hammam et la zone de l’arc de Sévère Alexandre s’animent d’une foule bigarrée. C’est la «zarda» de «Lella Mokhôla» qui a toujours lieu un vendredi. On collecte l’argent pour pouvoir immoler une vache noire comme celle qui a été sacrifiée en premier pour la sainte. Une partie de la viande est distribuée aux pauvres et le reste sert à préparer un couscous.
Les pèlerins ont toujours le même rituel. Ils offrent à la Sainte des bougies, de l’encens, du henné afin qu’elle exauce leurs vœux. Les filles inscrivent le nom de leur bien aimé sur les murs du sanctuaire alors que les femmes y dessinent, avec du henné ou du sang animal, des poissons et la main de fatma pour éloigner le mauvais œil.

Le sacré et le profane se rejoignent, car les Douiggis perpétuent, sans le savoir, un culte à une Sainte d’origine païenne remontant à l’antiquité et révélé par une inscription trouvée sur les lieux. Le terme de Mokhôla aurait pour origine le nom de la source, Moccolitane apportée par l’aqueduc jusqu’à l’antique Dougga. L’eau est ainsi à l’origine d’un culte qui perdure jusqu’à nos jours.

Frida Dahmani

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