Le chef de l’opposition tunisienne Rached Ghannouchi a été placé en détention provisoire après son arrestation en début de semaine, a annoncé jeudi son parti Ennahdha, dénonçant son « emprisonnement injuste ».
Ghannouchi, un ancien président du parlement, a été arrêté lundi après des propos avertissant que l’éradication de différents points de vue comme la gauche ou l’islam politique, dont est issu son parti, pourrait conduire à une « guerre civile ».
La principale alliance d’opposition, le Front de salut national (FSN), dont Ennahdha est membre, a déclaré qu’il était soupçonné de « complot contre la sûreté de l’Etat ».
L’avocat de Ghannouchi, Mokhtar Jemai, a déclaré que le tribunal avait ordonné la détention de son client après plus de neuf heures d’interrogatoire. Ghannouchi a 81 ans.
Ennahdha a rejeté toute suggestion selon laquelle Ghannouchi appelait à une guerre civile, affirmant qu’il « condamne fermement une décision injuste qui vise à dissimuler l’échec total des autorités à résoudre les problèmes économiques et sociaux ».
La Tunisie est lourdement endettée et confrontée à une inflation et à un chômage élevés, ce qui pousse certains de ses citoyens à tenter de fuir vers l’Europe.
Depuis début février, les autorités de ce pays d’Afrique du Nord ont arrêté plus de 20 opposants et personnalités politiques.
Ennahdha a dominé le parlement dissous
Le parti d’opposition d’inspiration islamiste Ennahdha détenait le plus de sièges au parlement tunisien avant que le président Kais Saied ne dissolve la chambre en juillet 2021 dans une prise de pouvoir lui permettant de gouverner par décret.
Saied affirme que les détenus étaient des « terroristes » impliqués dans un « complot contre la sécurité de l’Etat ».
Les opposants ont qualifié ses actions de «coup d’État» et ont condamné un retour à un régime autocratique dans la seule démocratie à émerger des soulèvements du printemps arabe dans la région il y a plus de dix ans.
La Tunisie négocie depuis plusieurs mois avec le Fonds monétaire international un prêt de près de 2 milliards de dollars, mais les discussions semblent au point mort.
Mardi, l’Union européenne des 27 a exprimé sa « préoccupation » suite à l’arrestation de Ghannouchi, rappelant l’importance du « principe fondamental du pluralisme politique ».
Les États-Unis ont condamné mercredi les arrestations d’opposants politiques et déclaré que le respect de la liberté d’expression et des droits de l’homme était essentiel « à la relation américano-tunisienne ».
Tunis a riposté par une déclaration énergique mercredi, les qualifiant d' »ingérence inacceptable ».