En effet, Sélima Karoui du Syndicat des Métiers des Arts Plastiques (SMAP) nous explique que vers 17h devant la galerie peu de temps après la mise en place de la sculpture de Najet Gherissi sur laquelle devait être effectuée la performance street art de graffs et de tags, un attroupement de passants a pris violemment à parti les artistes.

Ces mêmes individus ont non seulement menacé de détruire la sculpture (dont les formes vagues pouvaient évoquer un corps féminin) si celle-ci n’était pas retirée immédiatement mais ces avertissements s’adressaient également aux artistes présents. Devant ces intimidations physiques, la performance a été annulée et la sculpture remballée. Cette scène s’est déroulée sous les yeux des forces de l’ordre qui n’ont pas jugées utiles d’intervenir en faveur de la liberté d’expression artistique… C’est inadmissible.

Du côté du Kef, trois jours après la diffusion de Persépolis sur Nessma TV, c’était un professeur de théâtre, Regeb Magri, qui se faisait tabasser par des salafistes devant chez lui. La raison invoquée par les agresseurs? Etre professeur de théâtre donc, pour eux, d’encourager le dévergondage et le “haram”. A Gafsa c’est l’atelier d’une artiste plasticienne qui a été incendié pour les mêmes raisons. Du côté de la justice, l’annonce aujourd’hui de la condamnation de 7 salafistes (sur une cinquantaine) à une amende de 9,600dt pour leur tentative d’incendie du siège de Nessma TV dimanche 9 octobre est totalement déconcertante. Ou va-t-on ? Quelle société désire-t-on pour nous et les générations futures ?

Après 23 ans de dictature et une révolution, la question du droit à la liberté d’expression notamment artistique se poserait-elle encore ? Plus que jamais. Les actes de vandalisme, de violence physique et verbale, d’intimidations se multiplient à l’approche des élections prochaines. Il est fondamental que l’Etat condamne fermement ces actes et fassent appliquer la loi sans passe droit. Il s’agit aussi de la part de chaque citoyen de prendre pleinement conscience du risque de glissement despotique que représenterait la perte d’un acquis comme la liberté d’expression au nom de critères moraux ou religieux. Le fait de voter le 23 octobre prochain et de voter démocrate est plus que jamais une nécessité. En pays démocrate, quelque soit son appartenance religieuse, c’est la loi et donc les notions de légalité/illégalité qui font référence et non celui de “halal” ou de “haram”.

AM

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