Moncef Marzouki et le tourisme tunisien : «Nettoyer le secteur ne veut pas dire le tuer»

Mille et une Tunisie : Contestataire ou Contesté, comment vous définiriez-vous Mr Marzouki ?
Je ne suis pas la personne la plus contestée du pays. Dans le profond pays, je suis accueilli à bras ouvert. Contesté, je le suis de la part de certaines franges politiques, mais je conteste ce terme.
Contestataire ? Là aussi je conteste ce terme. Qu’est ce que nous avons contesté, la dictature ? Nous avons contesté certains politiques qui dans les années de plomb disaient on peut améliorer la situation et faire des élections avec elle. Seulement la dictature ne se corrige pas. C’était une absurdité monumentale que de le croire. Notre diagnostic s’est avéré objectif. Aujourd’hui nous ne sommes plus un parti d’opposition. Nous sommes un parti de propositions.

Mille et une Tunisie : Dans votre programme culturel, le CPR a pour ambition de susciter une culture enracinée dans un contexte arabo-musulman. Un choix qui, selon vous, rompt avec les choix déracinés qui ont marqué les 50 dernières années. Ne condamnez-vous pas ainsi une partie de la Tunisie, des Tunisiens et de l’histoire ?
Pas du tout. Je suis francophone et francophile. J’ai vécu dans des pays occidentaux et ma culture est aussi bien arabo-musulmane qu’occidentale. Je ne nie mon enracinement ni dans l’une ni dans l’autre. Seulement, tous les peuples doivent se développer à partir de leurs langues et à partir de leurs cultures.

Aujourd’hui la Tunisie a besoin de retrouver ses racines. Il ne s’agit nullement d’enfermement, bien au contraire ! La Tunisie doit s’ouvrir sur le monde. Ce que nous proposons au CPR, c’est de sortir de ce face à face avec la culture française et occidentale. J’ai beaucoup d’amitié pour la culture française dont je suis un produit, mais nous ne voulons plus que la Tunisie reste dans ce face à face. Il est certes enrichissant et a été important. Sans l’abandonner, nous devons nous ouvrir au monde.
Au CPR, nous pensons que l’intérêt de la Tunisie est d’ouvrir plusieurs fenêtres. C’est la raison pour laquelle nous voulons par exemple un lycée tuniso-chinois, tuniso-indien, tuniso-brésilien. Cela n’a rien à voir avec un enfermement, ni à un retour au passé. Je ne suis pas un homme du passé. Je suis un homme d’avenir.

Mille et une Tunisie : Quelles est la vision du CPR pour le tourisme ?
D’abord, la Tunisie doit diversifier ses ressources et ce besoin s’applique aussi au tourisme. Celui-ci a besoin d’être épuré. Il a pendant ses 20 dernières années été infiltré par les mafias dont il faut le purger. Il y a des anomalies et des injustices tellement criardes dont il faut le débarrasser. Nettoyer le secteur, ne veut pas dire le tuer. Il s’agit de lui donner une vivacité plus importante
Ensuite, il s’agira de développer un autre tourisme culturel, médical, écologique… Nous ne pouvons rester sur ce tourisme misérable qui a été notre choix. Un tourisme bas de gamme fréquenté par des touristes occidentaux relativement pauvres débarqués sur des plages plus au moins bien entretenues.

Il va falloir en finir avec le monopole des tours opérateurs, il va falloir en finir avec le mépris des régions intérieures et de leurs richesses. Il va falloir revoir l’ensemble pour promouvoir un tourisme plus complexe et enrichissant pour en finir avec ce tourisme en fin de course.

Mille et une Tunisie : Votre rapprochement avec Ennahdha me fait penser au tourisme « Hallal ». Votre pro arabisme me fait penser au modèle dubaiote de développement touristique. Qu’en pensez-vous ?
Vous me surprenez avec ma prétendue alliance avec Ennahdha. Il n’y en a pas. Il n’y en a jamais eu. Je ne dis pas qu’il n’y en aura pas. Si nous sommes dans une option de gouvernement d’union nationale avec plusieurs partis, pourquoi pas ? Ce n’est pas une honte de faire une alliance avec Ennahdha mais aujourd’hui ce n’est pas une réalité. N’anticipons pas !

Par rapport au modèle dubaiote, tout sauf cela. Il nous faut un modèle anti Dubaï. Un tourisme qui s’imprègne de la culture tunisienne et qui permette un rapprochement des peuples. C’est une vision complètement différente qu’il faut promouvoir.

Propos recueillis par Amel Djait

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